Communiqué de presse
Les variations de luminosité des étoiles semblables au Soleil : un mystère de plus en plus obscur
Les astronomes confrontés à l’ignorance socratique
7 décembre 2009
Une importante étude réalisée avec le très grand télescope (le VLT) de l’ESO ne fait qu’accentuer encore plus un mystère de longue date dans l’étude des étoiles semblables au Soleil. Les peu courantes - et inexpliquées !- variations de luminosité, au long de l’année, d’environ un tiers de toutes les étoiles de cette catégorie dans les dernières phases de leur vie se retrouvent donc sans explication. Au cours des dernières décennies, les astronomes ont proposés de nombreux scénarios possibles, mais une nouvelle et très poussée campagne d’observation les contredit tous et ne fait qu’approfondir le mystère. La recherche d’une interprétation valable est donc ouverte…
« Les astronomes sont plongés dans l’obscurité et, pour une fois, nous n’aimons pas ça » déclare Christine Nicholls de l’Observatoire du Mont Stromlo en Australie, auteur principal de l’article présentant cette étude. « Nous avons réalisé la série d’observations la plus complète à ce jour pour étudier ce type d’étoiles semblables au Soleil et les données obtenues montrent clairement que toutes les explications possibles de leur comportement insolite s’écroulent. »
Le mystère étudié par cette équipe date des années 30 et concerne environ un tiers des étoiles semblables au Soleil dans la Voie Lactée et dans les autres galaxies. Toutes les étoiles ayant une masse similaire à celle de notre Soleil deviennent, vers la fin de leur vie, rouges, froides et extrêmement grandes, juste avant de « prendre leur retraite » sous la forme d’une naine blanche. Aussi connues sous le nom de géantes rouges, ces vieilles étoiles montrent de très fortes variations périodiques de leur luminosité sur des périodes pouvant aller jusqu’à deux ans.
« On pense que de telles variations sont causées par ce que l’on appelle des pulsations stellaires, » précise Christine Nicholls, « en gros, une étoile géante gonfle et rétrécit, sa luminosité devenant plus forte puis plus faible, de manière cyclique et régulière. Toutefois, un tiers des ces étoiles révèle une variation périodique additionnelle de luminosité inexpliquée, même sur de plus longues périodes pouvant aller jusqu’à cinq ans. »
Afin de découvrir l’origine de ce comportement secondaire, les astronomes ont observé, pendant deux ans et demi, 58 étoiles de notre voisin galactique, le Grand Nuage de Magellan. Ils ont obtenu des spectres en utilisant le spectrographe de haute résolution FLAMES/GIRAFFE, installé sur le très grand télescope de l’ESO et les ont combinés avec des images prises par d’autres télescopes [1], réunissant une impressionnante base de données sur les propriétés de ces étoiles variables.
Les importantes bases de données comme celle obtenue par Christine Nicholls et ses collègues apportent souvent des indications sur la manière de résoudre un puzzle cosmique en limitant le nombre pléthorique d’explications possibles proposées par les théoriciens. Dans ce cas pourtant, les observations sont incompatibles avec tous les modèles conçus précédemment et réouvrent ainsi une question qui avait été profondément débattue. Grâce à cette étude, les astronomes sont maintenant conscients de leur propre « ignorance » - un véritable moteur du processus de quête de connaissance, tel que le philosophe grec Socrate est supposé avoir pensé.
« Cette nouvelle collecte de données montre que les pulsations sont une explication extrêmement différente de ces variations additionnelles » précise Peter Wood, le responsable de l’équipe. « Un autre mécanisme possible, pouvant produire des variations de luminosité d’une étoiles, serait que l’étoile elle-même se transforme en système binaire. Pourtant, nos observations sont également totalement incompatibles avec cette hypothèse. »
Grâce à des analyses plus récentes, cette équipe a découvert que quelle que soit la cause de ces variations inexpliquées, elle provoque également les éjections de masse, en blocs ou sous la forme de disques en expansion, des géantes rouges. « Nous avons besoin d’un Sherlock Holmes pour résoudre ce très frustrant mystère » conclue Christine Nicholls.
Notes
[1] Les mesures précises de luminosité ont été faites avec la collaboration des programmes MACHO et OGLE, respectivement avec des télescopes en Australie et au Chili. Les observations du programme OGLE ont été réalisées en même temps que les observations faites avec le VLT.
Plus d'informations
Cette recherche a été présentée dans deux articles: l’un a été publié dans l’édition de novembre du Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (“Long Secondary Periods in Variable Red Giants”, by C. P. Nicholls et al.), l’autre vient juste d’être publié dans l’Astrophysical Journal (“Evidence for mass ejection associated with long secondary periods in red giants”, by P. R. Wood and C. P. Nicholls).
L’équipe est composée de Christine P. Nicholls et Peter R. Wood (Research School of Astronomy and Astrophysics, Australia National University), Maria-Rosa L. Cioni (Centre for Astrophysics Research, University of Hertfordshire, UK) and Igor Soszyński (Warsaw University Observatory).
L’ESO - l’Observatoire Européen Austral - est la première organisation intergouvernementale pour l’astronomie en Europe et l’observatoire astronomique le plus productif au monde. L’ESO est soutenu par 14 pays : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L’ESO conduit d’ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l’astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d’importantes découvertes scientifiques. L’ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l’organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L’ESO gère trois sites d’observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. A Paranal, l’ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l’observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde. L’ESO est le partenaire européen d’ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L’ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d’un télescope européen géant – l’E-ELT- qui disposera d’un miroir primaire de 42 mètres de diamètre et observera dans le visible et le proche infrarouge. L’E-ELT sera « l’œil tourné vers le ciel » le plus grand au monde.
Liens
- Les articles scientifiques : http://arxiv.org/abs/0907.2975 et http://arxiv.org/abs/0910.4418
Contacts
Christine Nicholls
Mount Stromlo Observatory
Australia
Tél: +61-2-6125 0222
Courriel: Nicholls@mso.anu.edu.au
Peter Wood
Mount Stromlo Observatory
Australia
Tél: +61-2-6125 8032
Courriel: wood@mso.anu.edu.au
Joerg Gasser (contact presse pour la Suisse)
Réseau de diffusion scientifique de l'ESO
Courriel: eson-switzerland@eso.org
A propos du communiqué de presse
Communiqué de presse N°: | eso0948fr-ch |
Legacy ID: | PR 48/09 |
Nom: | Stars, Sun |
Type: | Unspecified : Star Unspecified : Nebula |
Facility: | Very Large Telescope |
Instruments: | FLAMES |
Science data: | 2009MNRAS.399.2063N |